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LES FRÈRES CORSES

Un troisième hurlement retentit, mais, cette fois, si près de nous, que je ne pus m’empêcher de frissonner, quoique la cause me fût parfaitement connue.

En effet, au détour d’un sentier, je vis blanchir, à une vingtaine de pas de nous, un tas de pierres formant une pyramide de quatre ou cinq pieds de hauteur. C’était le Mucchio.

Au pied de cet étrange monument, Diamante était assis, le cou tendu, la gueule ouverte. Lucien ramassa une pierre, et, ôtant son bonnet, s’approcha du Mucchio.

J’en fis autant, me modelant de tous points sur lui.

Arrivé près de la pyramide, il cassa une branche de chêne vert, jeta d’abord la pierre, puis la branche ; puis enfin fit avec le pouce ce signe de croix rapide, habitude corse s’il en fût, et qui échappait à Napoléon lui-même en certaines circonstances terribles.

Je l’imitai jusqu’au bout.

Puis nous nous remîmes en routée, silencieux et pensifs.

Diamante resta en arrière.

Au bout de dix minutes, à peu près, nous entendîmes un dernier hurlement, et presque aussitôt Diamante, la tête et la queue basses, passa près de nous, piqua une pointe d’une centaine de pas, et se remit à faire son métier d’éclaireur.