— Voyons cette cuirasse, dit le marchand, quand ils furent arrivés sous l’auvent.
— Tenez.
— Attendez ; on remue, je crois, dans la maison.
— Non, c’est en face.
Le marchand se retourna.
En effet, en face il y avait une maison à deux étages, dont le second s’éclairait parfois fugitivement.
— Faisons vite, dit le marchand en palpant la cuirasse.
— Hein ! comme elle est lourde ! dit Samuël.
— Vieille, massive, hors de mode.
— Objet d’art.
— Six écus, voulez-vous ?
— Comment ! six écus ! et vous en avez donné dix là-bas pour un vieux débris de corselet !
— Six écus, oui ou non, répéta le marchand.
— Mais considérez donc les ciselures !
— Pour revendre au poids, qu’importent les ciselures ?
— Oh ! oh ! vous marchandez ici, dit Samuël, et là-bas vous avez donné tout ce qu’on a voulu.
— Je mettrai un écu de plus, dit le marchand avec impatience.
— Il y a pour quatorze écus, rien que de dorures !
— Allons, faisons vite, dit le marchand, ou ne faisons pas.
— Bon ! dit Samuël, vous êtes un drôle de marchand : vous vous cachez pour faire votre commerce ; vous êtes en contravention avec les édits du roi, et vous marchandez les honnêtes gens ?
— Voyons, voyons, ne criez pas comme cela.
— Oh ! je n’ai pas peur, dit Samuël en haussant la voix ; je ne fais pas un commerce illicite, et rien ne m’oblige à me cacher.
— Voyons, voyons, prenez dix écus et taisez-vous.
— Dix écus ? Je vous dis que l’or seul les vaut ; ah ! vous voulez vous sauver ?