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de ce fameux vin de 1550, et dévoré les vingt-deux volumes dont se composait la bibliothèque du prieuré, et dans lesquels le prieur avait lu cet axiome latin : Bonum vinum lætificat cor hominis, Chicot se sentit un grand poids à l’estomac et un grand vide au cerveau.

— Je me ferais bien moine, pensa-t-il ; mais chez Gorenflot je serais trop le maître, et dans une autre abbaye je ne le serais point assez ; certes, le froc me déguiserait à tout jamais aux yeux de M. de Mayenne ; mais, de par tous les diables ! il y a d’autres moyens que les moyens vulgaires : cherchons. J’ai lu dans un autre livre, il est vrai que celui-là n’est point dans la bibliothèque de Gorenflot : Quere et invenies.

Chicot chercha donc, et voici ce qu’il trouva.

Pour le temps, c’était assez neuf.

Il s’ouvrit à Gorenflot, et le pria d’écrire au roi sous sa dictée.

Gorenflot écrivit difficilement, c’est vrai, mais enfin il écrivit que Chicot s’était retiré au prieuré, que le chagrin, d’avoir été obligé de se séparer de son maître, lorsque celui-ci s’était réconcilié avec M. de Mayenne, avait altéré sa santé, qu’il avait essayé de lutter en se distrayant, mais que la douleur avait été la plus forte, et qu’enfin il avait succombé.

De son côté. Chicot avait écrit lui-même une lettre au roi.

Cette lettre, datée de 1580, était divisée en cinq paragraphes.

Chacun de ces paragraphes était censé écrit à un jour de distance et selon que la maladie faisait des progrès.

Le premier paragraphe était écrit et signé d’une main assez ferme.

Le second était tracé d’une main mal assurée, et la signature, quoique lisible encore, était déjà fort tremblée.

Il avait écrit Chic… à la fin du troisième.

Ch… à la fin du quatrième.