— Pourquoi, si tu ne dis rien, si tu ne la désignes pas, si tu restes toujours caché ? Le bourgeois a-t-il parlé quand on lui a fait cette galanterie ?
— Il a harangué l’orchestre. Eh ! tenez, mon frère, le voilà qui va parler encore.
En effet, Briquet, décidé à tirer la chose au clair, se levait pour interroger une seconde fois le chef de l’orchestre.
— Taisez-vous, là-haut, et rentrez, cria Anne de mauvaise humeur ; que diable ! puisque vous avez eu votre sérénade, vous n’avez rien à dire, tenez-vous donc en repos.
— Ma sérénade, ma sérénade, répondit Chicot de l’air le plus gracieux ; mais je veux savoir au moins à qui elle est adressée, ma sérénade.
— À votre fille, imbécile !
— Pardon, Monsieur, mais je n’ai pas de fille.
— À votre femme alors.
— Grâce à Dieu ! je ne suis pas marié.
— Alors à vous, à vous en personne.
— Oui, à toi, et si tu ne rentres pas…
Joyeuse, joignant l’effet à la menace, poussa son cheval vers le balcon de Chicot, et cela tout au travers des instrumentistes.
— Ventre de biche ! cria Chicot, si la musique est pour moi, qui donc vient ici m’écraser ma musique ?
— Vieux fou ! grommela Joyeuse en levant la tête, si tu ne caches pas ta laide figure dans ton nid de corbeau, les musiciens vont te casser leurs instruments sur la nuque.
— Laissez ce pauvre homme, mon frère, dit du Bouchage ; le fait est qu’il doit être fort étonné.
— Et pourquoi s’étonne-t-il, morbleu ! D’ailleurs, tu vois bien qu’en faisant naître une querelle, nous attirerons quelqu’un à la fenêtre ; donc, rossons le bourgeois, brûlons sa maison s’il le faut, mais, corbleu ! remuons-nous, remuons-nous !
— Par pitié, mon frère, dit Henri, n’extorquons pas l’at-