Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/35

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— Tais-toi, Scipion, tais-toi, petit, ajouta-t-il tout en cherchant sa carte dans toutes ses poches.

Pendant ce temps, Militor, pour obéir à l’injonction de son père, s’inclinait légèrement et sans sortir ses mains de sa ceinture.

— Pour l’amour de Dieu ! Monsieur, votre carte ! s’écria Loignac impatienté.

— Venez çà et m’aidez, Lardille, dit à sa femme le Gascon tout rougissant.

Lardille détacha l’une après l’autre les deux mains cramponnées à sa robe, et fouilla elle-même dans la gibecière et dans les poches de son mari.

— Bien ! dit-elle, il faut que nous l’ayons perdue.

— Alors, je vous fais arrêter, dit Loignac.

Le Gascon devint pâle.

— Je m’appelle Eustache de Miradoux, dit-il, et je me recommanderai de M. de Sainte-Maline, mon parent.

— Ah ! vous êtes parent de Sainte-Marine ? dit Loignac un peu radouci. Il est vrai que, si on les écoutait, ils sont parents de tout le monde ! Eh bien, cherchez encore, et surtout cherchez fructueusement.

— Voyez, Lardille, voyez dans les hardes de vos enfants, dit Eustache, tremblant de dépit et d’inquiétude.

Lardille s’agenouilla devant un petit paquet de modestes effets, qu’elle retourna en murmurant.

Le jeune Scipion continuait de s’égosiller.

Il est vrai que ses frères de mère, voyant qu’on ne s’occupait pas d’eux, s’amusaient à lui entonner du sable dans la bouche.

Militor ne bougeait pas ; on eût dit que les misères de la vie de famille passaient au-dessous ou au-dessus de ce grand garçon sans l’atteindre.

— Eh ! fit tout à coup M. de Loignac ; que vois-je là-bas, sur la manche de ce dadais, dans une enveloppe de peau ?

— Oui, oui, c’est cela ! s’écria Eustache triomphant ; c’est