Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 2.djvu/16

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— Borromée ! fit le duc surpris, qu’est-ce que cela ?

— C’est, Monseigneur, répondit Mayneville, celui que vous m’envoyâtes de Nancy, quand je demandai à Votre Altesse un homme d’action et un homme d’esprit.

— Je me rappelle ; je vous répondis que j’avais les deux en un seul, et je vous envoyai le capitaine Borroville. A-t-il changé de nom et s’appelle-t-il Borromée ?

— Oui, Monseigneur, de nom et d’uniforme ; il s’appelle Borromée, et est jacobin.

— Borroville, jacobin !

— Oui, Monseigneur.

— Et pourquoi donc est-il jacobin ? Le diable doit bien rire s’il l’a reconnu sous le froc.

— Pourquoi il est jacobin ?

La duchesse fit un signe à Mayneville.

— Vous le saurez plus tard, continua celui-ci, c’est notre secret, Monseigneur ; et, en attendant, écoutons le capitaine Borroville ou le frère Borromée, comme il vous plaira.

— Oui, d’autant plus que sa visite m’inquiète, dit madame de Montpensier.

— Et moi aussi je l’avoue, dit Mayneville.

— Alors introduisez-le sans perdre un instant, dit la duchesse.

Quant au duc, il flottait entre le désir d’entendre le messager et la crainte de manquer au rendez-vous de sa maîtresse.

Il regardait à la porte et à l’horloge.

La porte s’ouvrit, et l’horloge sonna onze heures.

— Eh ! Borroville, dit le duc, ne pouvant s’empêcher de rire, maigre un peu de mauvaise humeur, comme vous voilà déguisé, mon ami !

— Monseigneur, dit le capitaine, je suis en effet bien mal à mon aise sous cette diable de robe ; mais enfin, il faut ce qu’il faut, comme disait M. de Guise le père.

— Ce n’est pas moi, toujours, qui vous ai fourré dans