Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 2.djvu/61

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le petit cabinet situé au bout du dortoir, espèce de salle d’audience où ce juge sans appel rendait ses arrêts.

— Est-ce donc ainsi qu’on se conduit, Monsieur ? lui dit-il tout d’abord ; voilà, si je compte bien, cinq jours et cinq nuits d’absence, et c’est vous, vous, Monsieur, que je croyais un des plus raisonnables, qui donnez l’exemple d’une pareille infraction ?

— Monsieur, répondit Ernauton en s’inclinant, j’ai fait ce qu’on m’a dit de faire.

— Et que vous a-t-on dit de faire ?

— On m’a dit de suivre M. de Mayenne, et je l’ai suivi.

— Pendant cinq jours et cinq nuits ?

— Pendant cinq jours et cinq nuits, Monsieur.

— Le duc a donc quitté Paris ?

— Le soir même, et cela m’a paru suspect.

— Vous aviez raison, Monsieur, Après ?

Ernauton se mit alors à raconter succinctement, mais avec la chaleur et l’énergie d’un homme de cœur, l’aventure du chemin et les suites que cette aventure avait eues. À mesure qu’il avançait dans son récit, le visage si mobile de Loignac s’éclairait de toutes les impressions que le narrateur soulevait dans son âme.

Mais lorsqu’Ernauton en vint à la lettre confiée à ses soins par M. de Mayenne :

— Vous l’avez, cette lettre ? s’écria M. de Loignac.

— Oui, Monsieur.

— Diable ! voilà qui mérite qu’on y prenne quelque attention, répliqua le capitaine ; attendez-moi, Monsieur, ou plutôt venez avec moi, je vous prie.

Ernauton se laissa conduire, et arriva derrière Loignac dans la cour aux Chevaux du Louvre.

Tout se préparait pour une sortie du roi : les équipages étaient en train de s’organiser ; M. d’Épernon regardait essayer deux chevaux nouvellement venus d’Angleterre, présent d’Élisabeth à Henri : ces deux chevaux, d’une harmonie