Ernauton s’inclina.
— Faites-y attention, monsieur le messager, dit-elle en riant, vous me faites une déclaration d’amour.
— Mais oui, Madame, dit Ernauton : je ne sais si je vous reverrai jamais, et, en vérité, l’occasion m’est trop précieuse pour que je la laisse échapper.
— Alors, Monsieur, je comprends.
— Vous comprenez que je vous aime, Madame ? c’est chose facile à comprendre, en effet.
— Non, je comprends comment vous êtes venu ici.
— Ah ! pardon. Madame, dit Ernauton, à mon tour, c’est moi qui ne comprends plus.
— Oui, je comprends qu’ayant le désir de me revoir, vous avez pris un prétexte pour vous introduire ici.
— Moi, Madame, un prétexte ! Ah ! vous me jugez mal ; j’ignorais que je dusse jamais vous revoir, et j’attendais tout du hasard, qui déjà deux fois m’avait jeté sur votre chemin ; mais prendre un prétexte, moi, jamais ! Je suis un étrange esprit, allez, et je ne pense pas en toute chose comme tout le monde.
— Oh ! oh ! vous êtes amoureux, dites-vous, et vous auriez des scrupules sur la façon de revoir la personne que vous aimez ? Voilà qui est très-beau, Monsieur, fit la dame avec un certain orgueil railleur ; eh bien ! je m’en étais doutée que vous aviez des scrupules.
— Et à quoi, Madame, s’il vous plaît ? demanda Ernauton.
— L’autre jour, vous m’avez rencontrée ; j’étais en litière ; vous m’avez reconnue, et cependant vous ne m’avez pas suivie.
— Prenez garde, Madame, dit Ernauton, vous avouez que vous avez fait attention à moi.
— Ah ! le bel aveu vraiment ! Ne nous sommes-nous pas vus dans des circonstances qui me permettent, à moi surtout, de mettre la tête hors de ma portière, quand vous