comme une psalmodie que la distance ne permettait pas de saisir. Enfin, le murmure continuant, le cuisinier s’en inquiéta et vint écouter à la porte. Il entendit les litanies d’Hiraux ; il comprit avec terreur ce qui se passait. En un instant, une lampe fut allumée, la porte de la cave ouverte, et le spectacle attendu dévoilé dans toute son horreur.
Chaque futaille pissait à plein robinet la liqueur qu’elle avait dans le ventre, et le mélange de toutes ces liqueurs avait déjà produit une inondation de six pouces de hauteur et qui allait toujours croissant.
Hiraux, à cheval sur un foudre, calme comme le Bacchus indien, attendait philosophiquement que la marée l’atteignît.
Cette fois, le crime était tellement patent, le coupable, au lieu de le nier, s’en vantait avec une telle impudence, que le cuisinier ne crut pas avoir besoin d’en référer au prieur, et décida qu’il se ferait justice tout seul.
On commença par fermer les robinets ; c’était le plus pressé. Puis on s’empara d’Hiraux, qui ne fit aucune tentative pour fuir ; puis on assembla le tribunal, qui se composa du frère cuisinier et des marmitons.
Il fut décidé à l’unanimité qu’Hiraux passerait par les verges.
C’était un jugement sans appel et exécutoire à l’instant même.
Aussi l’exécution eut-elle lieu incontinent, et, malgré les cris du patient, dura-t-elle dix minutes. Après quoi, le frère cuisinier, pour calmer la douleur et pour effacer les traces saignantes que l’exécution avaient laissées, prit une poignée de poivre et saupoudra la partie endommagée.
Hiraux faillit en perdre les yeux.
Cela semblera étrange au premier abord, et peut-être pourra-t-on croire que je déplace la question.
Il n’en est point ainsi. Hiraux pleurait, Hiraux saignait ; les yeux et le derrière lui causaient une douleur presque égale. Hiraux se frottait alternativement les yeux et le derrière, transportant, par ce double exercice, le poivre de son derrière à ses yeux. Il en résulta que l’inflammation gagnait rapidement,