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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/113

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

gée en restant mignonne et charmante, comme je vous ai vue la dernière fois que je vous ai rencontrée.


XLI


M. Moquet de Brassoire. — L’embuscade. — Trois lièvres me chargent. — Ce qui m’empêche d’être le roi de la chasse. — Faute d’avoir attaqué le taureau par les cornes, je manque d’être éventré par lui. — Sabine et ses petits.

Je demande pardon de la digression ; au reste, elle nous a conduits à Brassoire.

Au bruit de notre voiture, M. Moquet accourut pour nous recevoir. C’était un de ces riches fermiers à l’hospitalité antique, qui, à chaque fois qu’il y avait chez lui une de ces chasses gigantesques réunissant tous les chasseurs des environs, tuait un cochon, un veau et un mouton. D’ailleurs, homme d’esprit, d’instruction, habile à la théorie et à la pratique, et passant pour avoir les plus beaux mérinos qu’il y eût à vingt lieues à la ronde.

Un splendide souper nous attendait. Il va sans dire qu’un chasseur qui se présentait comme moi, simple conscrit, avec des états de service sur lesquels étaient portés, pour toute recommandation, six alouettes et une perdrix, fut l’objet des brocards de toute la compagnie, brocards auxquels M. Moquet, en sa qualité d’hôte, eut le bon esprit de ne point prendre part. Seulement, en nous levant de table :

— Laissez faire, me dit-il tout bas, je vous placerai aux bons endroits, et il ne tiendra pas à moi que, demain soir, ce ne soit vous qui vous moquiez d’eux.

— Soyez tranquille, répondis-je avec cette charmante confiance qui ne m’abandonnait jamais, je ferai de mon mieux.

Le lendemain, à huit heures du matin, tous les chasseurs étaient réunis, et une trentaine de paysans des environs faisaient queue à la grande porte de la ferme.

C’étaient des rabatteurs.