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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 2.djvu/315

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

JULIEN, apercevant le major.

N’approchez pas, demeurez où vous êtes.
Il lit…

LE COMTE.

Il lit…Sans doute un récit de combats,
Ce livre ?

JULIEN, regardant par-dessus l’épaule du major, et revenant à son père.

Ce livre ?C’est Victoires et Conquêtes.

LE COMTE.

Tu vois, enfant, je ne me trompais pas :
Son cœur revole aux champs de l’Allemagne !
Il croit encor voir les Français vainqueurs…

JULIEN.

Mon père, il lit la dernière campagne,
Car de ses yeux je vois couler des pleurs ?

Ma part de travail faite dans l’œuvre, je la portai à de Leuven. De Leuven, je dois le dire, était plein d’indulgence ; mais, cette fois, arrivé au couplet que je viens de citer, son indulgence monta jusqu’à l’enthousiasme, il mit le couplet sur l’air :

Dis-moi, soldat, dis-moi, t’en souviens-tu ?

Il le chanta deux fois, quatre fois, dix fois, s’interrompant pour dire :

— Oh ! oh ! voilà un couplet qui sera bissé, si la censure nous le laisse.

Car dès, cette époque, était en vigueur cette honorable institution appelée la censure, et qui n’a fait que croître et prospérer depuis.

J’avoue que j’étais bien fier ; je ne croyais pas avoir fait un