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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/234

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Un chien s’égosillait à force d’aboyer.
« Plaise à Sa Majesté, disait-il, m’octroyer
Droit de donner la chasse, en toute circonstance,
À tous les animaux vivant de ma substance.
— Gentilshommes, à vous permis de giboyer.
Dit, s’adressant au tigre, au loup, au renard même,
Des forêts le maître suprême ;
Aux chasseurs tels que vous permis de déployer,
Même chez leurs voisins, leurs efforts, leurs astuces ;
Mais néant au placet du chien !
Que réclamait, pourtant, ce roturier-là ? — Rien,
Que le droit de tuer ses puces.

les deux bambous.

L’an passé, — c’était l’an quarante, —
L’an passé, le Grand Turc disait au grand vizir :
« Quand, pour régner sous moi, je daignai te choisir,
Roustan, je te croyais d’humeur bien différente.
Roustan met son plus grand plaisir
À me contrarier ; quelque ordre que je donne,
Au lieu d’obéir, il raisonne ;
Toujours des si, toujours des mais ;
Il défend ce que je permets :
Ce que je défends, il l’ordonne.
À rien ne tient qu’ici je ne te fasse voir
À quel point je suis las de ces façons de faire !
Va-t’en ! Qu’on fasse entrer mon grand eunuque noir ;
C’est celui-là qui connaît son affaire,
C’est lui qui, toujours complaisant,
Sans jamais m’étourdir de droit ni de justice,
N’ayant de loi que mon caprice,
Sait me servir en m’amusant.
Jamais ce ton grondeur, jamais cet air sinistre !
Ainsi que tout désir, m’épargnant tout travail,
Il conduirait l’empire aussi bien qu’un sérail.
J’en veux faire un premier ministre.
— En fait de politique et de gouvernement,
Sultan, dit le vizir, chacun a son système :