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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 3.djvu/31

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

les terres de M. Scribe. Je m’embarquais sur cette branche avec ma mère, et j’allais rejoindre de Leuven à Paris.

Là s’ouvrait pour moi une carrière semée de roses et de billets de banque.

On comprend avec quelle anxiété j’attendis les premières lettres d’Adolphe.

Ces premières lettres tardèrent à arriver. C’était déjà un sujet d’inquiétude.

Enfin, un matin, le facteur, ou plutôt la factrice — une vieille femme, nommée la mère Colombe — se dirigea vers la maison. Elle tenait à la main une lettre ; cette lettre était de l’écriture d’Adolphe et portait le timbre de Paris.

Les directeurs — Adolphe ne pouvait dire pourquoi — ne mettaient pas à se disputer nos chefs-d’œuvre l’empressement que nous étions en droit d’attendre d’eux.

Cependant, Adolphe ne perdait pas l’espoir d’obtenir des lectures.

S’il n’en obtenait pas, il faudrait confier les manuscrits à des examinateurs, ce qui était fort humiliant !

Malgré les lueurs d’espérance qui flottaient encore sur le papier, le ton général de l’épître était lamentable.

Au reste, Adolphe promettait de me tenir exactement au courant de ses démarches.

J’attendis une seconde lettre.

Cette seconde lettre mit plus d’un mois à venir.

Oh ! cette fois, il restait bien peu d’espoir.

Le Dîner d’amis, emprunté à M. Bouilly, n’offrait pas une intrigue suffisante ; le Major de Strasbourg ressemblait au Soldat laboureur, qu’on venait de représenter avec le plus grand succès aux Variétés.

Quant aux Abencèrages, il y avait, dans chacun des théâtres du boulevard, un mélodrame reçu sur le même sujet, à l’un depuis dix ans, à l’autre depuis quinze, à l’autre depuis vingt ans.

En supposant donc que le nôtre fût reçu, cela, comme on voit, nous rejetait bien loin.