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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 4.djvu/160

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

qu’il était dans son droit, et que je prends le cabaret sur mon compte.

C’était un prince sage comme Salomon, et juste comme saint Louis, que ce pauvre duc !…

Le Théâtre-Français, au reste, n’était pas en veine. Après avoir joué le Cid d’Andalousie de M. Lebrun, il joua la Judith de M. de Comberousse, et le Bélisaire de M. de Jouy.

Un important changement venait de se faire au théâtre de la rue de Richelieu. Sur la recommandation de MM. Lemercier, Viennet et Alexandre Duval, M. le baron Taylor avait été nommé commissaire royal, en remplacement de M. Choron.

Au moment où Charles X rentrait à Paris, après le sacre, et comme monseigneur l’évêque d’Orléans avait ordonné des prières en actions de grâces de la cérémonie qui venait de s’accomplir, M. Bergeron, curé de la commune de Saint-Sulpice, canton de Blois, après avoir donné en chaire lecture du mandement de son évêque, ajouta ces simples paroles :

— Mes très-chers frères, comme Charles X n’est point chrétien ; qu’il veut maintenir la Charte, qui est un acte contre la religion, nous ne devons pas prier pour lui, pas plus que pour Louis XVIII, qui a été le fondateur de cette Charte : ils sont damnés tous deux ; que ceux qui sont de mon avis se lèvent.

Et trois cents auditeurs, sur quatre cents, se levèrent, manifestant, par cet acte d’adhésion, qu’ils étaient absolument du même avis que leur curé.

Hélas ! si l’Académie eût su quel homme c’était, que ce baron Taylor, que l’ordonnance de Charles X introduisait dans le sanctuaire de la Comédie-Française ; si elle eût pu deviner qu’il en ouvrirait les portes à MM. Alexandre Dumas, Victor Hugo et de Vigny[1], comme elle eût, à l’exemple du curé Bergeron, excommunié le roi Charles X ! Mais elle n’en savait rien.

  1. Je place, on le comprend bien, mon nom et celui de mes deux honorables confrères, selon l’ordre chronologique des représentations de Henri III, de Marion Delorme et d’Othello.