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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 4.djvu/277

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

propres excès : un projet vous sera soumis pour atteindre ce but. »

Ce paragraphe n’était rien de moins qu’une menace.

Cette menace se traduisit en un projet de loi présenté à la Chambre sous le titre de Projet de loi sur la police de la presse.

La lecture de ce projet fat vingt fois interrompue par l’opposition, et se termina au milieu d’une agitation terrible.

Casimir Périer quitta son banc en s’écriant :

— Autant vaut proposer une loi en un seul article qui dirait : « L’imprimerie est supprimée en France au profit de la Belgique ! »

M. de Châateaubriand appela cette loi une loi vandale. Et, au cri poussé par la capitale, toute la France répondit, envoyant des pétitions particulières et collectives, qui toutes avaient pour but de supplier la Chambre de rejeter ce projet comme destructif de toutes les libertés publiques, comme désastreux pour le commerce et comme attentatoire aux droits sacrés de la propriété. Au milieu de cette terrible manifestation, qui, en 1827, présageait déjà l’opposition armée de 1830, le Moniteur eut l’adresse ou la perfidie, — on ne connaît jamais bien le fond des sentiments du Moniteur, — enfin, le Moniteur eut l’adresse ou la perfidie, dans un article apologétique qu’il fit de cette loi, de la qualifier de loi de justice et d’amour.

Oh ! alors, le sarcasme, cette arme si puissante en France, eut un côté où se reprendre ; il se cramponna à ce titre, et en fit un poignard qu’il retourna de toute façon dans le cœur de M. de Peyronnet.

Tout se prononça contre cette loi, l’Académie elle-même.

Ce fut M. de Lacretelle qui attacha ce grelot, si difficile à attacher, et qui devait réveiller les quarante immortels sur leurs fauteuils.

Le 4 janvier, il lut un discours plein d’énergie sur les inconvénients du projet de loi, sur les entraves qu’il osait mettre à la pensée ; il répudiait cette nouvelle censure qui faisait les imprimeurs juges des auteurs, et demandait que l’Académie,