— Eh bien, Louët, vous voilà donc ! Mais, mon ami, vous avez l’air d’un millionnaire !
— Ah ! oui, parce que je suis mieux mis qu’autrefois ; eh bien, justement, au contraire, je n’ai plus le sou.
— Comment ! vous n’avez plus le sou ?
— Non. J’ai aventuré ma petite fortune, et je l’ai perdue.
— Entièrement ?
— Entièrement.
— Ah ! pauvre garçon !
— Aussi, je viens vous demander…
— Quoi ?… Ce n’est pas un conseil pour la refaire, n’est-ce pas ?
— Non. C’est votre protection.
— Auprès du ministère ? demandai-je étonné.
— Non.
— Auprès du roi ? demandai-je plus étonné encore.
— Non.
— Auprès du duc d’Orléans ?
— Oui !
Je me rembrunis. Cette sainte et respectueuse amitié que j’avais vouée au duc, j’aurais tellement voulu la rendre pure de tout intérêt, afin que lui-même en comprît la réalité par le désintéressement, que, chaque fois qu’on me priait de demander quelque chose au prince royal, on me causait une peine réelle.
— Auprès du duc d’Orléans ! répétai-je. Et que voulez-vous donc, mon cher Louêt, que je demande pour vous au duc d’Orléans ?
— Une petite place.
— Une petite place !
Et je haussai les épaules.
— Il ne vous refusera pas cela, à vous, ajouta Louët.
— Mais si, au contraire, cher ami, il me refusera cela, parce que je serrai le premier à lui dire de me le refuser.
— Pourquoi cela ?
— Parce que vous n’avez aucun titre, parce que vous ne connaissez pas M. le duc d’Orléans.