pour que cela aille mieux encore, il faut crier quelque chose.
— Vous avez raison, criez, mon ami… Pendant ce temps-là, je dormirai, moi.
— Que faut-il que je crie ?
— Vive la République ! parbleu !…
Nous sortîmes de Dammartin aux cris de « Vive la République ! »
Entre Dammartin et Nanteuil, nous aperçûmes une voiture qui venait en poste. En voyant notre drapeau tricolore, elle s’arrêta ; ceux qu’elle conduisait mirent pied à terre.
— Quelles nouvelles ? nous cria un homme d’une cinquantaine d’années.
— Le Louvre est pris, les Bourbons sont en fuite ; il y a un gouvernement provisoire composé de la Fayette, Gérard, etc. Vive la République !
Le monsieur d’une cinquantaine d’années se gratta l’oreille, et remonta en voiture.
C’était M. Cunin-Gridaine.
Nous continuâmes notre route. À huit heures moins vingt minutes, nous étions à Nanteuil.
Nous n’avions plus que trois heures vingt minutes devant nous, et il nous restait douze lieues à faire. Il n’était pas probable que nous les fissions ; mais j’ai pour principe qu’il ne faut désespérer que lorsqu’il n’y a plus d’espoir, et encore !…
À Nanteuil, nous relayâmes. Le drapeau tricolore fit son effet accoutumé. On ne savait rien de Paris ; nous apportions les premières nouvelles positives. On nous donna un vieux postillon, à qui je criai :
— Quatre lieues à l’heure ; trois francs de guides !
— C’est bien ! c’est bien, dit le bonhomme ; on connaît son état : on a conduit le général.
Le général, c’était mon père ; on voit que je rentrais dans le pays natal.
— Eh bien, si vous avez conduit mon père, vous savez qu’il aimait à marcher vite ; je suis comme lui.