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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 6.djvu/211

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— C’est bien, c’est bien, on connaît son état.

— Partez, alors.

— On part !

— Oh ! fit le postillon que je quittais, je vous plains, monsieur Dumas ; vous avez là une mauvaise pratique !

— Je le ferai bien marcher, soyez tranquille.

— Je vous le souhaite… Bon voyage ! — Allons, père Levasseur, un peu de vif-argent dans les bottes !

Le postillon partait, en effet.

— Père Levasseur, lui criai-je, je vous ai dit trois francs de guides, si nous sommes à huit heures et demie à Levignan.

— Si on n’y est pas à huit heures et demie, on y sera à neuf heures… On connaît son état.

— Vous entendez, père Levasseur, lui répétai-je, je veux être à Levignan à huit heures et demie.

— Bah ! le roi dit : Nous voulons.

— Oui, mais il n’y a plus de roi… Allons, allons !

— Laissez-nous monter le roidillon, et l’on verra après.

Nous montâmes le roidillon ; le roidillon monté, le père Levasseur mit ses chevaux au trot.

J’eus patience pendant dix minutes ; mais, au bout de dix minutes :

— Oh ! père Levasseur, ça ne peut pas aller comme cela ! lui dis-je.

— Et comment voulez-vous donc que ça aille ?

— Plus vite !

— Plus vite ? C’est défendu.

— Défendu, par qui ?

— Par les règlements… On connaît son état, que diable !

— Père Levasseur…

— Plaît-il ?

— Laissez-moi descendre.

— Ooh !… ooh !…

La voiture s’arrêta ; je descendis ; je coupai une branche à un orme de la route.

— Dites donc, demanda le père Levasseur, qui me regar-