dait faire avec inquiétude, ce n’est pas pour taquiner mes chevaux, j’espère, que vous taillez ce scion-là ?
— Ne vous inquiétez pas, père Levasseur.
Je remontai dans la voiture.
— En route !
— En route, en route, tout cela est bel et bon ; mais c’est que, si c’était pour taquiner mes chevaux, voyez-vous, que vous avez taillé ce scion-là…
— Eh bien, après ?
— Après, nous verrions… Je n’ai pas peur de vous parce que vous avez un fusil, moi !
— Père Levasseur, vous savez votre état de postillon, n’est-ce pas ?
— On s’en vante !
— Eh bien, moi ; je sais mon état de voyageur… Votre idée est, à ce qu’il paraît, d’aller le plus doucement possible ; la mienne est d’aller le plus vite que je peux… Nous allons voir celui de nous deux qui est le plus fort.
— Nous verrons tout ce que vous voudrez, je m’en moque.
Je tirai ma montre.
— Père Levasseur, vous avez deux minutes pour vous décider.
— À quoi ?
— À mettre vos chevaux au galop.
— Sinon ?
— Sinon, je les y mettrai moi-même.
— Vraiment ?
— C’est comme cela !
— Eh bien, je suis curieux d’en voir la farce.
— Vous la verrez, père Levasseur.
Le père Levasseur se mit à entonner la complainte de saint Roch. Pendant tout ce temps-là, on avait été au petit trot.
— Père Levasseur, dis-je après le premier couplet, je vous préviens qu’il y a déjà une minute de passée.
Le père Levasseur entonna le second couplet à pleine gorge ; mais, au moment où il allait entonner le troisième, je coupai la croupe de ses chevaux d’un vigoureux coup de baguette.