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Page:Dumas - Mes mémoires, tome 6.djvu/247

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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

Je dormais depuis une heure probablement, lorsque je me sentis vigoureusement secoué.

Je rouvris les yeux ; j’avais affaire à Hutin.

— Eh ! réveillez-vous donc ! me dit-il.

— Pourquoi ? demandai-je en bâillant. Je dors si bien !

— Mais parce qu’il paraît que votre ancien notaire, M. Mennesson, a révolutionné la ville, sous prétexte que vous faites les affaires du duc d’Orléans, — et on ne veut pas nous laisser passer.

— Moi, les affaires du duc d’Orléans ?… Ah çà ! mais il est fou ou soûl !

— Fou, soit ; mais, en attendant, il paraît qu’il va falloir en découdre.

— En découdre ! et avec qui ?

— Avec les gardes de la forêt d’abord.

— Avec les gardes de la forêt ? Entendons-nous… Comment faudra-t-il en découdre avec les gardes de la forêt, qui sont au duc d’Orléans, parce que je fais les affaires du duc d’Orléans ?

— Oh ! moi, je n’y comprends rien… Je vous préviens, voilà tout. Maintenant que vous êtes prévenu, marchons.

J’achevai de me réveiller. Nous étions au bas de la montagne de Dampleux, et c’était un de mes amis de Villers-Cotterets qui était accouru nous avertir de ce qui se tramait contre nous.

J’appelai Moreau, qui composait à lui seul toute notre cavalerie.

— Moreau, lui dis-je, faites-moi le plaisir, pour achever votre cheval, de le mettre au galop, et d’aller voir jusque chez Cartier ou même jusque chez Paillet, ce qu’il y a de vrai dans ce qu’on nous annonce. Si vous rencontrez M. Mennesson, prévenez-le que j’ai deux balles dans mon fusil, et que, s’il ne veut pas faire connaissance avec elles, il se tienne hors de portée.

Moreau partit au galop ; je me mis à l’avant-garde avec Hutin et six ou huit hommes qui me parurent prêts à tout, et je laissai Bard avec les vingt-cinq ou trente autres, pour