— Il y a deux prix : quand ce sont des peintres, c’est quarante sous.
— Comment, quarante sous ?… quarante sous pour quoi ?
— Pour la nourriture et le logement, donc !
— Ah ! quarante sous !… Et combien de repas ?
— Tant qu’on veut ! deux, trois, quatre… à sa faim, quoi !
— Bien ! vous dites donc que c’est quarante sous par jour ?
— Pour les peintres… Êtes-vous peintre, vous ?
— Non.
— Eh bien, ça sera cinquante sous, et cinquante sous pour votre dame, cent sous.
Je ne pouvais pas croire au chiffre.
— Cent sous, alors… pour deux, trois ou quatre repas et deux chambres ?
— Cent sous… Est-ce que vous croyez que c’est trop cher ?
— Non, si vous ne nous augmentez pas.
— Et pourquoi donc faire vous augmenterais-je ?
— Dame ! ça s’est vu.
— Ah ! pas ici… Si vous étiez peintre, ça ne serait que quarante sous.
— D’où vient ce rabais au profit des peintres ?
— C’est que ce sont de bons enfants, et que je les aime. Ce sont eux qui ont commencé la réputation de mon auberge.
— À propos, connaissez-vous un peintre nommé Decamps ?
— Decamps ? Je crois bien !
— Et Jadin ?
— Jadin ? Je ne connais que ça.
Je crus que la mère Oseraie se vantait ; mais j’avais une pierre de touche.
— Et Huet ? lui demandai-je.
— Oh ! celui-là, certainement que je le connais aussi.
— Vous ne vous rappelez rien de particulier sur lui ?
— Si fait, je me rappelle que je lui ai sauvé la vie.
— Bah ! et comment cela, donc ?
— Un jour qu’il s’étranglait avec une arête de sole… Faut-il être bête de s’étrangler avec une arête de sole !
— Et de quelle façon lui avez-vous sauvé la vie ?