Page:Dumas - Une Année à Florence.djvu/136

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Le grand-duc mettait assez d’eau dans son vin, mais elle quasi point. »

Qu’on mette ce portrait à côté de celui du Bronzino, et l’on verra que tous deux se ressemblent ; seulement il y a dans le tableau du sombre peintre toscan un caractère de fatalité qui ne se trouve pas sous la plume du naïf moraliste français.

Trois ans après le mariage de Francesco et de Bianca, c’est-à-dire au commencement de l’année 1585, le jeune archiduc mourut, laissant le trône de Toscane sans héritier direct ; or, à défaut d’héritier direct, le cardinal Ferdinand devenait grand-duc à la mort de son frère.

En 1576, le grand-duc Francesco avait eu un fils de Bianca ; mais ce fils étant adultérin ne pouvait succéder à son père ; d’ailleurs on racontait de singulières choses sur sa naissance. On racontait que la Bianca, voyant qu’elle n’aurait jamais probablement d’autre enfant qu’une petite fille qu’elle avait eue de son mari, et qui s’appelait Pellegrina, avait résolu d’en supposer un. En conséquence, elle s’était entendue avec une gouvernante bolonaise dans laquelle elle avait toute confiance ; et voilà, disait-on, ce qui était arrivé.

Bianca avait feint toutes les indispositions, symptômes ordinaires d’une grossesse ; bientôt à ces indispositions s’étaient joints des signes extérieurs, si bien que le grand-duc, n’ayant plus aucun doute, avait annoncé lui-même à ses plus intimes que Bianca allait le rendre père. Dès lors le crédit de la favorite avait doublé, on avait été au devant de tous ses désirs, et tous les courtisans, plus empressés que jamais autour d’elle, lui avaient prédit un fils.

La nuit du 29 au 30 août 1576 fut choisie pour être celle de l’accouchement ; vers les onze heures du soir, Bianca annonça donc à son mari qu’elle commençait à éprouver les premières douleurs. Francesco, tremblant et joyeux à la fois, déclara qu’il ne la quitterait point qu’elle ne fût délivrée. Ce n’était point là l’affaire de Bianca ; aussi, vers les trois heures, les douleurs commencèrent à s’apaiser, et la sage-femme déclara qu’elle croyait que la patiente n’accoucherait que dans trois ou quatre heures. Alors Bianca in-