Page:Dumas - Une Année à Florence.djvu/250

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répugnance pour les femmes lui permettait de tenir plus facilement que tout autre !

Puis le bourreau devint ensevelisseur. Il mit dans un cercueil tout préparé le corps dont il venait de chasser l’âme, ferma la bière et l’expédia à Florence, où elle fut ensevelie la même nuit et en secret dans l’église de San-Lorenzo.

Au reste, don Pierre ne tint pas même son serment ; il épousa, en 1595, Béatrix de Ménessès ; il est vrai que c’était dix-sept ans après l’assassinat d’Éléonore, et que Pierre de Médicis, avec son caractère, devait avoir oublié non seulement le serment fait, mais la cause qui le lui avait dicté.

Passons maintenant aux filles de Cosme.

Marie était l’aînée : c’était à dix-sept ans, comme le dit Shakespeare de Juliette, une des plus belles fleurs du printemps de Florence. Le jeune Malatesti, page du grand-duc Cosme, en devint amoureux ; la pauvre enfant de son côté, l’aima de ce premier amour qui ne sait rien refuser. Un vieil Espagnol surprit les deux amans dans un tête-à-tête qui ne laissait aucun doute sur l’intimité de leur liaison, et rapporta au grand-duc Côme ce qu’il avait vu.

Marie mourut empoisonnée à dix-sept ans ; car sa vie, prolongée de six mois, eût été un déshonneur pour sa famille. Malatesti fut jeté en prison, et, étant parvenu à s’échapper au bout de dix ou douze ans, gagna l’île de Candie, où son père commandait pour les Vénitiens. Deux mois après on le trouva un matin assassiné au coin d’une rue.

Lucrèce était la seconde fille de Cosme. À l’âge de dix-neuf ans, elle épousa le duc de Ferrare. Un jour, arriva à la cour de Toscane un courrier qui annonça que la jeune princesse était morte subitement. On dit à la cour qu’elle avait été enlevée par une fièvre putride ; on dit dans le peuple que son mari l’avait assassinée dans un moment de jalousie.

Isabelle était la troisième. C’était la favorite de son père. L’amour de Cosme pour sa fille dépassait même, comme on va le voir, les bornes de l’amour paternel.

Un jour que Vasari, caché par son échafaudage, peignait le plafond d’une des salles du Palais-Vieux, il vit entrer dans cette salle Isabelle. C’était vers midi, l’air était ardent. Igno-