Page:Dumas - Une Année à Florence.djvu/91

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fille et perdait de jour en jour l’espoir de lui donner un frère. En conséquence, le prince Antoine maria, le 20 octobre 1715, la princesse Louise-Hippolyte à Jacques-François-Léonor de Goyon-Matignon, auquel il céda le duché de Valentinois, en attendant qu’il lui laissât la principauté de Monaco, ce qu’il fit à son grand regret le 26 février 1751. Jacques-François-Léonor de Goyon-Matignon, Valentinois par mariage, et Grimaldi par succession, est donc la souche de la maison régnante actuelle, qui va s’éteindre à son tour dans la personne d’Honoré V et dans celle de son frère, tous deux sans postérité masculine et sans espérance d’en obtenir.

Honoré IV régnait tranquillement, lorsque arriva la révolution de 89. Les Monacois en suivirent toutes les phases avec une attention toute particulière, puis lorsque la république fut proclamée en France, ils profitèrent d’un moment où le prince était je ne sais où, s’armèrent de tout ce qu’ils purent trouver sous leurs mains, et marchèrent sur le palais qu’ils prirent d’assaut, et dont ils commencèrent par piller les caves, qui pouvaient contenir douze à quinze mille bouteilles de vin. Deux heures après, les huit mille sujets du prince de Monaco étaient ivres.

Or, à ce premier essai de liberté, ils trouvèrent que la liberté était une bonne chose, et résolurent à leur tour de se constituer en république. Seulement, comme Monaco était un trop grand État pour donner naissance à une république une et indivisible comme était la république française, il fut résolu entre les fortes têtes du pays qui s’étaient constituées en assemblée nationale, que la république de Monaco serait, à l’instar de la république américaine, une république fédérative. Les bases de la nouvelle constitution furent donc débattues et arrêtées entre Monaco et Mantone, qui s’allièrent ensemble à la vie et à la mort : il restait un troisième village appelé Roque-Brune. Il fut décidé qu’il appartiendrait par moitié à l’une et à l’autre des deux villes. Roque-Brune murmura ; il aurait voulu être indépendant et entrer dans la fédération, mais Monaco et Mantone ne firent que rire d’une prétention aussi exagérée : Roque-Brune n’étant pas le plus fort, il lui fallut donc se taire : seulement, à