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CHAPITRE LVII.

ON A DES NOUVELLES D’ATHOS ET D’ARAMIS.


lettrine D’Artagnan s’était rendu droit aux écuries. Le jour venait de paraître ; il reconnut son cheval et celui de Porthos attachés au râtelier, mais au râtelier vide. Il eut pitié de ces pauvres animaux, et s’achemina vers un coin de l’écurie où il voyait reluire un peu de paille échappée sans doute à la razzia de la nuit ; mais en rassemblant cette paille avec le pied, le bout de sa botte rencontra un corps rond qui, touché sans doute à un endroit sensible, poussa un cri et se releva sur ses genoux en se frottant les yeux. C’était Mousqueton, qui, n’ayant plus de paille pour lui-même, s’était accommodé de celle des chevaux.

— Mousqueton, dit d’Artagnan, allons, en route ! en route !

Mousqueton, en reconnaissant la voix de l’ami de son maître, se leva précipitamment, et en se relevant laissa choir quelques-uns des louis gagnés illégalement pendant la nuit.

— Oh ! oh ! dit d’Artagnan en ramassant un louis et en le flairant, voilà de l’or qui a une drôle d’odeur, il sent la paille.

Mousqueton rougit si honnêtement et parut si fort embarrassé, que le Gascon se mit à rire et lui dit : — Porthos se mettrait en colère, mon cher monsieur Mouston, mais moi je vous pardonne ; seulement, rappelons-nous que cet or doit nous servir de topique pour notre blessure, et soyons gai, allons !

Mousqueton prit à l’instant même une figure des plus hilares, sella avec activité le cheval de son maître et monta sur le sien sans trop faire de grimace.

Sur ces entrefaites, Porthos arriva avec une figure fort maussade, et fut on ne peut plus étonné de trouver d’Artagnan résigné et Mousqueton presque joyeux.

— Ah çà, dit-il, nous avons donc, vous votre grade, et moi ma baronnie ?