Page:Dumas - Vingt ans après, 1846.djvu/644

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monseigneur, qui avez perdu la vôtre, et maintenant, que voulez-vous, monseigneur, c’est la loi de la guerre, il s’agit de la racheter.

Mazarin se sentit frissonner jusqu’au fond du cœur. Son regard si perçant se fixa en vain sur la face moqueuse du Gascon et sur le visage impassible de Porthos. Tous deux étaient cachés dans l’ombre, et la sibylle de Cumes elle-même n’aurait pas su y lire.

— Racheter ma liberté ! répéta Mazarin. — Oui, monseigneur. — Et combien cela me coûtera-t-il, monsieur d’Artagnan ? — Dame ! monseigneur, je ne sais pas encore. Nous allons demander cela au comte de la Fère, si Votre Éminence veut bien le permettre. Que Votre Éminence daigne donc ouvrir la porte qui mène chez lui, et dans dix minutes elle sera fixée.

Mazarin tressaillit.

— Monseigneur, dit d’Artagnan, Votre Éminence voit combien nous y mettons de formes, mais cependant nous sommes obligés de la prévenir que nous n’avons pas de temps à perdre ; ouvrez donc, monseigneur, s’il vous plaît, et veuillez vous souvenir une fois pour toutes qu’au moindre mouvement que vous feriez pour fuir, au moindre cri que vous pousseriez pour échapper, notre position étant tout exceptionnelle, il ne faudrait pas nous en vouloir si nous nous portions à quelque extrémité. — Soyez tranquilles, messieurs, dit Mazarin, je ne tenterai rien, je vous en donne ma parole d’honneur.

D’Artagnan fit un signe à Porthos de redoubler de surveillance, puis se retournant vers Mazarin :

— Maintenant, monseigneur, entrons s’il vous plaît.