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CHAPITRE X.

L’ABBÉ D’HERBLAY.


lettrine Au bout du village, Planchet tourna à gauche, comme le lui avait ordonné Aramis, et s’arrêta au-dessous de la fenêtre éclairée. Aramis sauta à terre et frappa trois fois dans ses mains. Aussitôt la fenêtre s’ouvrit, et une échelle de corde descendit.

— Mon cher, dit Aramis, si vous voulez monter, je serai enchanté de vous recevoir. — Ah çà, dit d’Artagnan, c’est comme cela que l’on rentre chez vous ? — Passé neuf heures du soir, il le faut, pardieu, bien ! dit Aramis ; la consigne du couvent est des plus sévères. — Pardon, mon cher ami, dit d’Artagnan ; il me semble que vous avez dit pardieu ! — Vous croyez ? dit Aramis en riant, c’est possible ; vous n’imaginez pas, mon cher, combien, dans ces maudits couvents, on prend de mauvaises habitudes et quelles méchantes façons ont tous ces gens d’église avec lesquels je suis forcé de vivre. Mais vous ne montez pas ? — Passez devant, je vous suis. — Comme disait le feu cardinal au feu roi : « Pour vous montrer le chemin, sire. »

Et Aramis monta lestement à l’échelle, et en un instant il eut atteint la fenêtre. D’Artagnan monta derrière lui, mais plus doucement ; on voyait que ce genre de chemin lui était moins familier qu’à son ami.

— Pardon, dit Aramis en remarquant sa gaucherie, si j’avais su avoir l’avantage de votre visite, j’aurais fait apporter l’échelle du jardinier. Mais pour moi seul celle-ci est suffisante.

— Monsieur, dit Planchet lorsqu’il vit d’Artagnan sur le point d’achever son ascension, cela va bien pour M. Aramis, cela va encore pour vous, cela, à la rigueur, irait aussi pour moi, mais les deux chevaux ne peuvent pas monter à l’échelle.

— Conduisez-les sous le hangar, mon ami, dit Aramis en montrant à Planchet