Aller au contenu

Page:Dumas fils - Théâtre complet, 1898 - Tome I.djvu/53

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui travaillent au lieu de prendre l’argent des changeurs ou de dérober les côtelettes des bouchers, parce qu’il y a une loi qui leur dit que s’approprier l’argent sans travail et les côtelettes sans argent, c’est voler, et que le vol est passible d’une peine.

Le jour où la société déclarera que l’honneur d’une femme et la vie d’un enfant sont des valeurs comme une douzaine de couverts ou un rouleau d’or, les hommes les regarderont à travers les vitres sans oser les prendre, et l’idée leur viendra de les acquérir et non de les voler. Au lieu de déshonorer les filles, on les épousera ; au lieu d’en faire des victimes, on en fera des alliées. De la condescendance des lois naît la facilité des mœurs.

Comment avez-vous pu établir entre les biens matériels et l’honneur de vos filles, de vos sœurs et de vos femmes, de la femme enfin, une si grande différence au désavantage de celle-ci !

Il faut que vous soyez aveugles, méchants ou fous.

Je conclus, je crois qu’il est temps.

Toute fille vient au monde vierge. Pour faire cesser cet état de virginité, il faut l’intervention de l’homme. Une fois cette virginité détruite autrement que par le mariage, le déshonneur commence pour elle et la prostitution se présente. Protégez la femme contre l’homme, et protégez-les ensuite l’un contre l’autre. Mettez la recherche de la paternité dans l’amour, et le divorce dans le mariage.

« Oh ! oh !… »

Mes moyens sont impraticables ? Trouvez-en d’autres, je ne tiens qu’aux résultats ; mais dépêchez-vous, parce que la maison brûle.

Vous ne voulez pas ? vous trouvez que ça peut aller comme ça, et que, pourvu qu’on s’occupe des hommes — qui feraient des révolutions si on ne s’occupait pas d’eux — tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possible ? Va bene ! Amusons-nous ! Vive l’amour ! Laissons la femme faire ce qu’elle fait, et, dans cinquante ans au plus, nos neveux (on n’aura plus d’enfants,