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de ne jamais l’exiger et de vivre en famille ; mais si les enfants viennent à vendre à la charge de la rente, le Seigneur fait une estimation de tous et chacun les articles de rente, servitudes, &c., pour dix ans ordinairement, quelquefois plus, selon l’âge des donateurs ; et sur le montant de cette estimation il retire les lods et ventes, ainsi que sur le prix convenu en argent ; en sorte que deux ou trois mutations suffisent quelquefois pour que le Seigneur, par ses lods et ventes, perçoive la valeur entière de la propriété.

Un père donne son bien à son fils, à la charge de lui payer pension ; le fils vend la terre à un troisième, enfin la terre est mise au Shérif par le Seigneur qui n’a pas reçu les lods ; le Seigneur reprend la propriété qui ne va pas au montant des lods ; il en résulte que le pauvre donateur, dépouillé de tous ses droits, perd sa pension, et sur ses vieux jours, se trouve dans le chemin avec une partie de sa famille, sans pain et sans force pour gagner sa vie.

Dans les villes et les villages, ces droits sont encore plus onéreux que sur les terres, en ce qu’un emplacement, dans son état primitif, ne vaut que quelques louis, devient par les capitaux qui y sont affectés à valoir des centaines de louis, le propriétaire se trouve retranché d’un douzième de ses déboursés pour enrichir le Seigneur, la valeur des bâtisses excédant toujours de beaucoup, et plusieurs fois, la valeur de l’emplacement ; mais sur les terres concédées en bois debout, il arrive que le cultivateur après avoir travaillé une partie de sa vie, et dépensé de fortes sommes, relativement à ses moyens, pour améliorer sa propriété, se trouve aussi retranché d’un douzième des fruits de ses travaux et de ses dépenses pour enrichir le Seigneur, ce qui ne peut que décourager l’homme industrieux.

Quel est l’homme qui puisse aimer l’injustice d’employer son labeur et son argent pour le profit des autres ? La tenure Seigneuriale ne tend qu’à l’anéantissement de l’industrie ; il