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ils la devaient à la science de l’argent, infuse en eux.

Ils n’en possédaient pas seulement la science, ils en avaient le sens intime. Rien qu’au doigté, Jacques reconnaissait une pièce fausse. Rien qu’à la vue, Antoine évaluait exactement la somme d’une pile d’or ou d’argent, si haute qu’elle fût. Philippe y devinait un cheveu intercalé.

Le plus merveilleux était Lucien ; il distinguait au flair un faux billet de banque.

C’était d’atavisme ; leur père, feu Michel Tamponneau, doué sous ce rapport de la double vue, avait déterré plusieurs fois des trésors cachés.

Lucien était le plus en vue des Tamponneau. Il incarnait les quatre grands Tamponneau et tous les Tamponneau juniors.

Il ne se targuait pas, comme ses frères, de goût scientifique et littéraire, mais il en avait.

À l’instar de Louis xv, de Louis-Philippe et de Léopold Ier de Belgique, il s’était passionné pour les ouvrages de style érotique, dont il possédait la plus curieuse collection.

C’étaient ses livres de chevet, les seuls qui eussent le don de calmer ses exacerbations névrotiques, de dissiper ses soucis d’affaires et de fixer ses préférences.

En fait de femmes, son jugement était impeccable.