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Page:Dumont - Paris-Éros. Deuxième série, Les métalliques, 1903.djvu/70

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C’était un ingrat, car le prince l’affectionnait comme tout ce qui paraissait plaire à sa belle maîtresse. C’était non seulement un galant homme, il avait encore en brave don Quichotte la bonté, la sagesse et les folles ardeurs.

Comme le chevalier de la Manche, il était grand, mince, efflanqué, il en avait la tête osseuse, le front large et la tête chaude, rêvant tournois, joutes et couleurs de la maîtresse de son cœur. Il aimait Isabelle de Rascogne en paladin, adressant à la lune les tendresses de son brave cœur.

Il était la deuxième providence ménagère de la duchesse depuis le marquis de la Tétonnière.

Les gens de service de l’hôtel l’adoraient. Cela ne les empêchait pas de le caricaturer et de le nommer le meunier du Moulin d’Amour.

En fait de moulin, il en avait une charge sur les épaules ; il n’était pas de fantaisie coûteuse que la belle veuve n’exigeât de lui pour prix de l’admiration platonique dont il se saturait.

Tout était au bleu dans le cerveau et dans l’espace du rayon visuel du prince. Il appelait sa Dulcinée, son oiseau bleu, sa dame bleue, sa colombe bleue. Il croyait au sang bleu de l’aristocratie nobiliaire. Aussi son juron favori était-il : Sangbleu ! qu’il répétait à tous propos.

Il était heureux ; que pouvait-il désirer de plus ?

Quant au beau cocher, il commençait à s’aper-