Page:Dumont - Paris-Éros. Première série, Les maquerelles inédites, 1903.djvu/32

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 20 —

Elle alla à la Portugaise et lui dit :

— Tu es splendide, Magoula. Où t’es-tu ainsi allumée ?

— Je ne sais pas, ça m’a dit tout à coup en entrant ici. Ce matin, je ne valais pas une chiquenaude.

— Regarde les têtes ? Ils semblent vannés.

— Ne t’y fie pas ; ils ont le teint plombé.

— Dans ce cas, en avant les violons !

La beauté plastique de Micken, moins flou, moins chaude que celle de la Portugaise, avait l’éclat et le poli du marbre ; elle suggestionnait davantage les érotiques poteaux.

C’était la beauté du plein air, des grèves et des forêts, en perpétuelle nostalgie du mâle.

Fille d’un pêcheur de Schweningue, elle avait passé dans bien des bras robustes avant d’entrer dans la carrière de la prostitution dorée.

Son premier entreteneur fut un Anglais, le général Kimber-Nigel, qui l’avait confortablement installée à Londres, dans le Strand.

Les officiers du Royal-Horse lui firent une cour assidue ; elle les aima tous, en extra.

Un soir, le général lui arriva à l’improviste, dérangeant un jeune aide de camp qui se réfugia piteusement sous le lit.

Le cher ami devait partir le lendemain matin pour le camp de Woolwich, où il avait été désigné