Page:Dumortier - Pomone tournaisienne.djvu/14

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
10
Pomologie belge.

qui a eu lieu. Le Beurré d’Hardenpont est à nos yeux un hybride du Bezi de Chaumontel et du Doyenné. Il a le bois tortueux, la feuille crolée, la forme du fruit du premier, la chair fine et fondante, dépourvue de pierres, et la peau dorée du dernier. Le Passe-colmar nous apparaît comme un semis du Colmar fécondé par le Rousselet. Il a le bois allongé, la tige diffuse, la feuille plate du Colmar, la fleur et le parfum du Rousselet. Le Beurré-rance est dû évidemment à un Bon-chrétien fécondé par un Colmar ; bois, feuille, fleur, forme du fruit, pédoncule du Bon-chrétien, succulence et chair du Colmar. Enfin, le Délice d’Hardenpont est à nos yeux le produit d’un Colmar fécondé par un Beurré gris ; bois allongé, feuille, forme du fruit et caducité du premier, chair beurrée et peau fine du second. Partout vous voyez l’hybridation, le produit de la fécondation artificielle, et vous vous expliquez ainsi ce phénomène de quatre fruits apparaissant ensemble et supérieurs à tout ce qui existait avant eux. La nature aime le croisement des races, et c’est par le croisement des races qu’Hardenpont doit avoir procédé. Ses magnifiques gains ne sont donc pas l’effet du hasard, mais le produit du calcul et du raisonnement.

Par ses gains si remarquables, Hardenpont a créé une étude nouvelle, et il est devenu le fondateur de la Pomologie ; on ne peut donc assez regretter que l’on ait dénaturé sa nomenclature et fait disparaître son nom glorieux de la science qu’il avait créée. Ses gains furent longtemps à sortir des limites de la Belgique. En 1806, M. L. Noisette, horticulteur de Paris, vint à Enghien[1] chez M. Parmentier qui avait alors le privilège exclusif de pouvoir aller en Angleterre afin d’en rapporter des plantes, ce qui faisait de lui le premier horticulteur de France. Tout en faisant ses achats chez Parmentier, il eut connaissance, au château du duc d’Aremberg, du Beurré d’Hardenpont et du Passe-colmar qui s’y cultivaient ; mais n’anticipons pas sur ce point.

  1. C’est par erreur qu’on a dit Heverlé.