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pomologie belge.

On s’est souvent demandé par quel moyen Hardenpont a pu obtenir des fruits aussi extraordinaires ; à notre avis, ce ne peut être que par la fécondation artificielle. Voici nos raisons.

Nous avons vu qu’Hardenpont suivait les cours de l’université de Louvain vers 1730, et qu’il y prit ses degrés de maitre-ès-arts, c’est-à-dire licencié en sciences. Or, c’est précisément l’époque où la découverte des sexes des plantes venait d’opérer une révolution dans les idées du monde savant. Cette importante découverte était la grande nouvelle de l’époque, et elle était enseignée partout. Dès 1727, le célèbre Boerbaave, professeur à l’université de Leyde, avait entrepris de caractériser tous les genres de plantes par leurs organes sexuels, dans son Index alter plantarum horti Lugduno-Batavi. Au genre Ricinus, vol. i, p. 252, il indique clairement les sexes des plantes, et l’on sait combien les leçons de Boerhaave avaient eu d’effet sur celles de l’université de Louvain. Sébastien Vaillant, de son côté, professait, dès 1717, cette doctrine nouvelle au jardin du Roi à Paris, et peu après Linné confirmait la grande découverte des sexes des plantes par l’établissement de son système sexuel.

La démonstration des sexes dans le règne végétal se faisait de deux manières, par la castration, et par la production des hybrides au moyen de la fécondation artificielle. Dans cette situation, on ne peut douter que l’attention du jeune Maître-ès-arts n’ait été fortement attirée sur cette curieuse découverte qui, par sa nouveauté et son importance, était de nature à l’impressionner, et nous arrivons à conclure que c’est par la fécondation artificielle qu’il a créé quatre fruits aussi extra-ordinaires. L’étude attentive de ces fruits nous semble résoudre cette curieuse question.

Rappelons-nous qu’à l’époque où Nicolas Hardenpont termina ses études universitaires, il n’existait que quelques poires fondantes, le Doyenné, le Beurré gris, le Colmar, le Bezi de Chaumontel, auxquelles il faut ajouter le Bon-chrétien et le Rousselet. Voilà donc les fruits qui ont dû servir à ses semis. Examinons maintenant ses gains et tâchons de découvrir ce