Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/147

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tout ce qui concernait la Justice.) Mais le Gouvernement, qui aime à voir son peuple adonné à la solution des problèmes criminels, plutôt qu’à l’étude des événements politiques, a vu là un dérivatif merveilleux des soucis d’opinion publique. Il a donc donné des instructions — secrètes — à sa presse, pour affoler ses lecteurs, et au procureur pour faire durer l’instruction et mener un coupable vraisemblable aux Assises. Mais il fut impossible de saisir non seulement le vrai coupable, mais même deux complices avérés, qui se sont enfuis on ne sait où. Il fallut donc se rabattre sur un malheureux incontestablement innocent. On peut toujours, avec un peu de casuistique judiciaire, et une argumentation convenable, mener devant des juges l’homme le plus pur. D’ailleurs, en principe, on ne condamne pas les innocents, ou alors à la peine même qu’ils ont accomplie en prévention, ce qui n’est rien, car dans nos sociétés modernes il n’y a plus de déshonneur comme jadis à avoir connu la prison. Des condamnés sont devenus ministres, grands banquiers et présidents de chambres de commerce, sans aucune difficulté. Mais, dans notre affaire, un problème s’est posé au dernier moment : celui de la condamnation possible de l’innocent par un jury stylé et intoxiqué de mensonges journalistiques. Tout le monde est