Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/23

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caressent, les mots qui… Car ces mots-là, ça doit exister. — Entrez, mademoiselle !

La porte franchie, et se sentant accueillie, la survenante posait l’habituelle et captieuse question :

— Je ne vous dérange pas, au moins ?…

— Mais pas du tout, pas du tout…

Il avait dit cela d’instinct et avec un élan qui l’étonna lui-même. Il fermait avec lenteur, en personne qui veut se reprendre avant de savoir ce qu’elle dira.

Ensuite il dépassa la jeune fille qui attendait. Un parfum léger mais délicat, non pas un parfum mort, de ceux qui stagnent dans les bouteilles, mais un parfum vivant, harmonisé à une chair sensible, lui vint aux narines. Jean Dué perçut aussitôt que tout son passé s’effaçait, que toute sa vie jusqu’ici n’avait été qu’une ombre vaine et que l’existence commençait en ce moment. Il naissait juste au monde des réalités sur lesquelles, un instant auparavant, il se posait de si étranges questions.

Il marcha. Elle le suivit. Lorsque tous deux furent sous une lampe incandescente, dans la pièce où des livres sur la table témoignaient encore des songes récents du rhétoricien, Jean crut ne plus reconnaître le lieu familier. Pour-