Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/249

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Il se connaît pourtant les mains glaciales et les lèvres sèches comme un sarment.

L’aimée est là, à dix pas… dix pas… Mais pourquoi une fulgurante image lui montre-t-elle ces dix pas comme ceux d’un condamné à mort entravé, qui, les yeux fous, regarde venir à lui la guillotine ?

Il a franchi les dix pas.

Une porte à ouvrir encore… une… et il sera elle, elle sera lui…

Un centième de seconde, une force désespérée tente de ramener en sa pensée la belle image, symbole et réalité du bonheur.

Il ouvre.

Devant lui c’est une nuit pleine, un styx.

Sur l’échine de Jean un frisson passe comme le coup d’aile de la mort.

Et c’est aussi le silence, un silence où nulle vie n’a place.

Il a fouillé dans sa poche. Une lampe électrique tremble au bout de son poing.

La pièce est vide.

Jean avance comme tenu par une main. Il arrive à la table où se tient une lampe froide, il y a près d’elle un vaste papier ouvert. Jean Dué regarde d’un œil lointain la feuille et les mots qui la couvrent de jambages capricieux.

Ce sont des mots… des mots…