Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/43

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sentiment de la passion qu’ils exprimèrent. Il n’avait d’ailleurs aucun désir sensuel.

Son ambition consistait à faire durer ce bonheur, égoïstement, le plus possible. Il restait incapable de deviner ce qui s’agitait en ce moment même dans la jolie petite tête qui lui faisait face. Il y voyait simplement fermenter toute la littérature amoureuse de ses auteurs favoris. Sans doute était-elle exprimée en termes moins précieux et choisis que dans les grands écrivains, car il avait le sens des hiérarchies sociales, et n’ignorait point que sa cousine fût de petite culture. Mais peu importe le mode d’expression des idées. Ce qui l’intéressait résidait moins dans les mots et la noblesse des syntaxes que dans les sentiments traduits. Or il croyait connaître ceux-ci.

Enfin Lucienne Dué dit :

— Mon cousin, je ne voudrais pas vous avoir causé un ennui. Vous avez l’air si étonné ! En elle-même elle disait « penaud »…

— Mais non, ma cousine. Qu’allez-vous croire là ?

— Vous n’attendiez pas une autre personne, je pense ?

Cette idée que lui, Jean Dué, pût attendre à minuit quelqu’un, fit rire le jeune homme.

— Qui aurais-je attendu ?