Page:Dunan - Eros et Psyché, 1928.djvu/62

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ennuyés qu’elle dirigeait toujours vers ses parents lorsqu’ils lui faisaient des reproches. Elle ne suivait pas la pensée cahotante du pauvre adolescent qui eût voulu lui dire délicatement son amour.

— Lucienne, ce qu’on éprouve ne se voit pas. Il faut des mots pour le faire entendre à autrui. Moi, je voudrais vous le dire mieux que personne, mais je n’ai pas le secret des paroles qui transfèrent…

Il voulait dire « l’amour », mais sa langue sécha dans sa bouche et il articula piteusement :

— … l’amitié,

Il continua :

— Alors, je m’en rends bien compte, j’ai l’air d’un sot. Le premier garçon de café ou de magasin saurait mieux dire que moi qu’il vous trouve belle. Il le sentirait moins, mais il l’exprimerait plus joliment.

Elle dit ironiquement :

— Je croyais que dans vos études on vous apprenait à bien faire les discours.

— Hé ! ma cousine, quel rapport y a-t-il entre les discours des classes et les mots que l’on dit dans la vie ? Certainement, on nous apprend à parler, mais de quel langage ampoulé et burlesque. Moi je voudrais ne vous dire que des mots sortant du cœur. Voilà : je ne sais pas !