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KASCHMIR, JARDIN DU BONHEUR

Ce qui me frappa, dès l’abord, ce fut une table ronde, placée au centre. Sur elle, une mousseline était dressée, couvrant des bibelots quasi sphériques, me parut-il, mais peu visibles. Quand je fus accroupi, malgré la lumière médiocre d’une lampe haut située, je reconnus ces objets. Il y avait là six têtes coupées et embaumées. Je perçus en moi, avec la peine cuisante de l’homme sans armes sur lequel pèse un danger, un sentiment de crainte irritée contre lequel je luttai difficilement.

Brusquement, la porte s’ouvrit. Un homme entra et s’assit loin de moi sans me regarder. Il était athlétique et portait un masque de statue grecque. Une robe tibétaine blanche le vêtait, avec des bottes de feutre à pointes relevées. La porte grinça à nouveau. Ce fut un européen, italien ou espagnol, petit, trapu, très vif, l’œil aigu et les dents luisantes, qui entra, pour s’installer à ma gauche, avec, me sembla-t-il une