Page:Dunan - La Papesse Jeanne, 1929.djvu/180

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voyageuse vagabonder, des spéculations platoniciennes sur les nombres aux finesses de l’art d’aimer selon le dodecalogue de la fameuse Paxamos, courtisane athénienne dont on possédait l’ouvrage en vers.

Froide et mélancolique, la douce enfant vivait comme en un songe, et rien en ses sens ne pouvait éveiller le souvenir d’Aphrodite. D’ailleurs une sorte de langueur la promettait, avant que sa destinée de femme fût accomplie, au bûcher tant haï des chrétiens ensevelisseurs. Mais elle s’en réjouissait, professant que la vie désormais ne méritait pas d’être vécue et que le monde était abandonné des dieux.

Ainsi passaient les jours, pour Ioanna, dans cette maison où on l’adoptait.

Oh ! vivre tant que la force dure en soi, dans un milieu semblable à celui des apotropéens. Attendre l’heure du Hadès sans regarder derrière soi, et s’endormir enfin avec la sagesse, sans souci de ce paradis et de cet enfer grâce auxquels les chrétiens recrutaient la foule de leurs partisans.

Et pendant ce temps le monde évoluait et se meurtrissait de mille façons.

Les fils de Louis, héritier de Carloman, le grand Empereur, s’étaient d’abord fait la guerre. Maintenant ils se réconciliaient. Ils avaient signé à Strasbourg un contrat plein d’arrière-pensées, en une langue barbare qui