Page:Dunan - La Papesse Jeanne, 1929.djvu/52

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ture clémente. On aimait une chose devenue ignorée désormais et que l’on nommait l’art.

L’art, c’était surtout les beaux vers, les belles idées et les belles statues.

Et l’enfant stupéfaite entendait tout cela comme dans un merveilleux songe. Elle rêvait du jour où il lui serait possible de vivre, comme son père n’avait su, aux bords de cette thalassa hellénique pareille à un bluet qui s’épanouit. Là était le bonheur sur terre. Sans doute même y avait-elle, car elle se croyait fille de Macaire et ignora toujours le secret de sa naissance, des parents qui seraient heureux de la voir. Et le songe fastueux emplissait cette jeune imagination de ses ardeurs inquiètes.

La femme écoutait en silence, experte seulement à rappeler que la vie n’est point, ici du moins, si belle que l’enfant semblait l’imaginer. Il y avait des hommes durs et méchants, des prêtres qui mettaient en prison ceux qui ne respectaient pas leurs dires ou ne suivaient pas les règles d’existence qu’ils affirmaient les seules propres à assurer le bonheur. Il y avait aussi la faim, la cruauté des hommes, et, pour une femme, leur désir. Il y avait des mauvais garçons qui volent et tuent, des bourgeois redoutables auxquels on ne refusait pas le droit de réclamer comme esclave évadé le premier