Page:Dunant - Un souvenir de Solférino, 1862.djvu/117

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utiles à leur pays, car le militaire qui est frappé d’une balle en défendant ou en servant sa patrie, ne mérite-t-il pas toute la sollicitude de cette patrie ? Quel officier, quel général, s’il considère ses soldats pour ainsi dire comme « ses enfants », ne serait désireux de faciliter la tâche de tels infirmiers ? Quel intendant militaire, quel chirurgien-major n’accepterait avec reconnaissance d’être secondé par une cohorte de personnes intelligentes, appelées à agir, avec tact, sous une bonne et sage direction ?[1] Enfin, à une époque où l’on parle tant de progrès et de civilisation, et puisque malheureusement les guerres ne peuvent être toujours évitées, n’est-il pas urgent d’insister pour que l’on cherche, dans un esprit d’humanité et de vraie civilisation, à en prévenir, ou tout au moins à en adoucir les horreurs ?

Pour être mise en pratique dans de grandes proportions, cette œuvre exigerait, il est vrai, des fonds assez considérables, mais ce n’est pas l’argent nécessaire qui lui manquera jamais. En temps de guerre, chacun apportera son offrande ou donnera sa pite avec empressement pour répondre aux appels qui seraient faits par les comités ; les populations ne restent pas froides et indiffé-

  1. Avec des sociétés comme celles que nous avons en vue, on éviterait bien des chances soit de gaspillage, soit de répartitions peu judicieuses des fonds et des secours envoyés. — Lors de la guerre d’Orient, par exemple, il fut dirigé sur la Crimée, et depuis St. Pétersbourg, des envois considérables de charpie, préparée par les dames russes ; mais ces ballots, au lieu de parvenir dans les hôpitaux où ils étaient adressés, prirent le chemin de papeteries, qui s’en emparèrent comme d’une marchandise propre à leur industrie.