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Page:Duplessis - Les Étapes d'un volontaire, 4, 1866.djvu/45

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MONSIEUR JACQUES.

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2 — J'ai mon oncle, un ami de Robespier de faire lever mon écrau.

— Alors, lu peux te cansidérer comme étant hors d'af- faire, Au revoir el bonne chance, J'espère que Lu viendras me voir une fois Surki de priso

— Jan’y manquera pas, ciloyen juge, lui répandis-je; mais permels-moi de l'adresser une dde à si tu me l'accordes, meltra le comble aux généreux procédés que lu as eus pour moi, Je suis, en ce moment, à l'Hospice Natio- mal, où, pour mieux dire à l'e: hé; fais-moi, je Len prie, sorlir de cel endroit et conduire dans une prison,

Je ne vois pas d'empéchement à cela, me répondit le . as-lu en vue une prison ? Si lu m'en crois, Lu iras à La- ! On prétend que les délenus ÿ sont Lraités comme des renliers.

— Va pour Lazare, et reçois tous mes remerciments.

En moins d'une minute, car les libellés pour les transferts ou les changements des prisonniers étaient imprimés à l° vance, en une minute, dis-je, le grefüer expédia l’ordre qui me renvoyait à la maison Lazare (jadis Saint-Lazare), et je partis pour ma nouvelle destination.

J'étais bien heureux en songeant que j'échappais à la 1- sane de l'assassin Eoguchard, mois de combien ma joie ne se serail-elle pas accrue si j'avais pu prévoir le honheur qui m'allendait à mon arrivée à la maison Lazare, Unesenle id jetait une ombre sur ma joie, c'était de penser que je ne re- Verrais probablement plis l'excellent Veyrier.

Grâce à Dieu, je me trompais : mon sauveur Veyrier de- vait échapper par miracle à l'orage révolutionnaire, et vivre encore de longues et paisibles années

Lorsque j'arrivai à la maison Lazare, l'on me fit entrer au gro pour y donner mes noms, prénoms et qualilé.

— Âs-tu de l'argent ? me demanda brusquement le con cierge de l'établissement, qui se nommait, — comme je l'ap- pris plus lard, — Semé, et avait été jadis inspecteur de la police Robespierrique,

— Quelques éeus que lon m'a fait passer à l'hôpital, Ii répondis-je, mais j'espère recevoir des fonds d'ici à fort peu de jours.

— C'est bien; on te taxera plus tard, me répondit-i

uis, me désignant à ses guichetiers : Conduisez ce fé

k e dans le corridor de Vendémiaire, leur dit-il, On n’en- traîna aussitôt,

. Comme j'étais encore extréèmement faible, et qu'il m'était imprssible de suivre le pas rapide du porte-ciefs qui me idait, il se relourna vers moi en grommelant et en me menaçant, si je le faisais ainsi attendre, de m'admiaistrer une correetion. :

En effet, nous venions d'atteindre l'endroit qui m'avait été désigné, c'est-à-dire le corridor désigné sous le nom de Vendémiaire, lorsque le guichelier s’aperçut que je me trou- vais epcore à une certaine distance en arrière de lui,

— Misérable! s'écria-t-il en s'élançant sur moi les poings fermés, me prends-tu donc pour un häbleur ! Ge que je dis, je le fais. È

À peine cette parole fat-elle prononcée, que l'infâme gui- ehelier me porta un coup violent au visage, En sent joue souillée par ce honteux contact, j'oubli faible, convaleseent, prisonnier ; que la rési possible, et, poussant un cri de rage, je m'élançai sur mon agresseur, que à la gorge.”

Surpris par celte riposte à laquelle il ne s'attendait certes pas, l'iguoble guichetier, quoique sa force musculaire dût être cent fois Supérieure à la mienne, chancela et glissa en m'eutratnant dans sa chue; par bonlieur jeus le dessus, et de profitai dé cet avantage pour accabler de conps ce misé- je tirai une complète vengeance du soufflet que j'avais


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“Tonte celte scène de violence s'était passée en vingt fois moins de temps que je n'en mets ici à la raconter : à peine le guichetier Kai tombé, qu'une foule compacte de déte- nus, alirés par le bruit de ia lutle, se forma autour de nous.

Mon triomphe, hélas ! devait être bien éphémère : le cui-

chetier, un moment troublé, reprit bientôt, avec son sang- froid, l'avantage qu'il avait perdu, el me saisissant à son tour, de sa main nerveuse, à la gorge, il se mil tout tran- quillement à m'étouffer. à

Les détenus présents n’osaient pas, je ne le devinais que Lrop bien, s'interpuser entre le porte-clefs eL moi; d la respiration me manquait et je iermais les yeux, quaud tout à coup une voix vibrante retentit à mes oreilles.

— Quiest-ce qui se permet de troubler ainsi le repos des prisonniers de Vendémiaire ? L la terrible vi

Au même instant, je me sentis soulever par une force irrésistible, et je me trouvai debout sur mes pieds!

— Merci, qui que vous soyez! dis-je en respirant l'air à pleins poumons, sans vous j'étais un honune mort!

— Quoi... c'es loi. loi! mon ami... Ah! je suis fou de joie, s'écria mon sauveur, en se précipitant dans mes bras, ù

— Anselme, m'écriai-je à mon tour avec une émotion égale à celle qu'il montrait, Nous confondimes nos embras- semenis el nos larmes,

— Dieu! comme tu es changé, mon pauvre ami! me dit Ansélme en me regardant d'un air attend ,

— Il y a bien de quoi, lui répandis-j quitié l'Abbaye, je suis resté malade à l'hôpital ! Si ma fai- blesse n'élait pas encore si grande, crois-lu donç que je me Ca laissé traiter comme je viens de re par ce guiche- ier?

— Pardien {tu m'y fais penser, s'écria Anselme, la joie que j'ai éprouvée en Le revoyant m'a fait oublier de corriger ce malotru de Leduc. Aliends-un peu! ça va être fait de suile, et je reviens à l'instant.

depuis que j'ai


XII

Auselme, sans vouloir m'écouter, s’élança aussitôt sur les pas du guichelier qui s'éloignait, el le saisissant de sa puis- sante main au beau milieu de la poitrine, il l'enleva de terre à bras tendu, et le tint suspendu à une hauteur de cinq où six pieds, et dans une position verticale, au-dessus du sol.

— JLieduc, lui ditil, si tu ne mo jures pas sur Robespierre, — Car je sais que par courtisanerie tu n'oserais pas manquer à ce serment, — Si lu ne me jures pas sur Robespierre que Lu n’essaieras pas de Le venger de mon ami, el si lu te relu- ses à lui adresser les excuses auxquelles iLa droit, je te jure, moi, que je vais te briser Je crâne contre le mur.

— ‘Ta me broies les côtes, répondit Leduc. d’une voix étonfée; voyons, cesse celle plaisasterie,

Je ne plaisante jamais avec des gueux de on espèce, répondit {ranquillement Anselme en agitont en l'air le corps du porte-clefs. Voyons, veux-tu jurer, ou bien faut-il que je te lance contre la muraille?

— Je jure sur Robespierre, murmura Leduc, que je ne me vengérai ni de toi ni de ton ami.

— Tu es un garçon plein de lâcheté ct de prudence, dit Anselme, qui, fidèle à sa promesse, déposa doucement sur le sol le guichetier. Te te félicite d'avoir su prendre si pardi; lu as fait preuve d'esprit,

A présent que nous n'avons plus à nous ocquper de ce drôle, continua mon ancien compagnon d'armes ep passant son bras sous le mien, allons, cher ami, chercher une cham- bre pour toi,

— Sais-tu bien, Anselme, lui dis-je, lorsque nous fûmes seuls, que tu viens de commettre une grave imprudence en humiliant, ainsi que tu l'as fait, le guichetier Ledue?

— Cher ami, je ne crois plus aux impradences, J'ai vu tant de braves gens inolfensifs et paisibles, occupés seule ment de leurs affaires, el ne se mêlant en rien de la politique, jorer leurs têtes sur l'échafaud, que je suis tenté de croire que la guilloline dévore les moutons de préférence aux loups.


lme, après m'avoir fait cette réponse, m'apprit que le