Page:Duplessis - Les Peaux-rouges, 1864.djvu/122

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du brave homme fut tellement grande, qu’il perdit tout-à-coup la tête, et ne trouva rien de mieux, dans le moment, que de faire un profond salut. L’ours extrêmement satisfait et flatté de cette politesse, fit entendre un grognement de joie, et s’en fut aussitôt sans songer à faire le moindre mal à l’honnête laboureur. Cette histoire, dont je puis garantir la vérité, prouve cependant qu’il est généralement reconnu que l’ours est susceptible. On comprendra donc facilement de quelle rage fut saisi le monstre lorsque la lourde carabine d’Antoine vint frapper violemment son museau, Son premier mouvement fut de regarder son audacieux provocateur d’un air terrible ; mais ses yeux brillants rencontrèrent ceux d’Antoine fixés sur lui avec non moins d’audace et de résolution ; sa seconde action fut de se laisser glisser le long de l’arbre jusqu’à terre, manœuvre qu’Antoine imita aussitôt avec une telle légèreté, que son pied toucha le sol avant que l’ours gris n’y fût parvenu. Ce fut alors un moment terrible et