Page:Dupont - Chants et Chansons, t. 1, 1855.djvu/18

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dans l’œuvre de Dupont. La beauté mélancolique de la nature a laissé dans son âme une telle empreinte, que s’il veut composer un chant funèbre sur l’abominable guerre civile, les premières images et les premiers vers qui lui viennent à l’esprit sont :

La France est pâle comme un lis,
Le front ceint de grises verveines.

Sans doute plusieurs personnes regretteront de ne pas trouver dans ses chants politiques et guerriers tout le bruit et tout l’éclat de la guerre, tous les transports de l’enthousiasme et de la haine, les cris enragés du clairon, le sifflement du fifre pareil à la folle espérance de la jeunesse qui court à la conquête du monde, le grondement infatigable du canon, les gémissements des blessés, et tout le fracas de la victoire, si cher à une nation militaire comme la nôtre. Mais qu’on y réfléchisse bien, ce qui chez un autre serait défaut chez Dupont devient qualité. En effet, comment pourrait-il se contredire ? De temps à autre, un grand accent d’indignation s’élève de sa bouche, mais on voit qu’il pardonnera vite, au moindre signe de repentir, au premier rayon de soleil ! Une seule fois, Dupont a constaté, peut-être à son insu, l’utilité de l’esprit de destruction ; cet aveu lui a échappé, mais voyez dans quels termes :

Le glaive brisera le glaive,
Et du combat naîtra l’amour !

En définitive, quand on relit attentivement ces chants politiques, on leur trouve une saveur particulière. Ils se tiennent bien, et ils sont unis entre eux par un lien commun, qui est l’amour de l’humanité.

Cette dernière ligne me suscite une réflexion qui éclaire d’un grand jour le succès légitime, mais étonnant, de notre poëte. Il y a des époques où les moyens d’exécution dans tous les arts sont assez nombreux, assez perfectionnés et assez peu coûteux pour que chacun puisse se les approprier en quantité à peu près égale. Il y