Page:Durand de Mende - Rational, vol 2, traduction Barthelemy, 1854.djvu/125

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III. Alléluia est un mot hébreu qui symbolise plutôt qu’il n’exprime l’ineffable joie qu’éprouvent ceux qui sont pèlerins en cette vie, joie qui est celle des anges et des hommes déjà placés dans le bonheur éternel que l’œil n’a point vu, que l’oreille n’a pas entendu, et que le cœur de l’homme n’a jamais ressenti. Selon Innocent III (lib. ii, cap. xxxi), l’explication de ce mot est contenue dans le psaume cxii, qui a pour titre : Allelu-ia, et qui commence par ces mots : Laudate, pueri, Dominum ; et selon lui Allelu-ia veut dire : « Enfants, louez le Seigneur. »

IV. Augustin l’explique ainsi : Al sauf, le moi, lu fais, ia Seigneur : « Seigneur, sauve-moi ; » salvum me fac, Domine. Selon Jérôme, Allelu-ia vient de alle chanter, lu louange, Ia au Seigneur : « Chanter les louanges du Seigneur. » Grégoire traduit ainsi : Alle le Père, lu le Fils, Ia l’Esprit saint ; ou bien : Alle la lumière, lu la vie, ia le salut. Maître Pierre d’Auxerre : Al Très-Haut (Altissimus), le il fut élevé sur la croix, lu les apôtres pleuraient (lugebant), ia il est déjà ressuscité. Pierre Comestor dit, sur App. et Augustin, dans sa Glose du Psautier ou des Psaumes (psalterii), qu’allelu-ia est un verbe au temps de l’impératif, et qu’il signifie allelu louez, Ia l’Universel, ou Ia l’Invisible, c’est-à-dire Dieu, comme si l’on disait : « Louange du Dieu invisible. » Et parce qu’Allelu-ia est en quelque sorte le nom propre de la future béatitude, on le dit à juste titre plus particulièrement et plus fréquemment au temps de Pâques, où le Christ, en ressuscitant, nous a donné l’espérance et la promesse de la béatitude, comme on le dira bientôt.

V. Jadis ce n’était pas la coutume de l’Église romaine de chanter l’Allelu-ia à la messe en d’autres temps ; mais cet usage fut établi ou plutôt rétabli par le bienheureux Grégoire. Car cette coutume, qui remontait au temps du pape Damase, était tombée en désuétude. Saint Jérôme dit que l’Allelu-ia que l’on chante à la messe a été emprunté à l’Église de Jérusalem.