Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/187

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Quatre jours après le départ d’Euronique, le capitaine Pasteur vint voir Louis, évidemment, pensa celui-ci, pour examiner le fond des choses. Le début de cette visite causa un grand crève-cœur au jeune homme.

Le capitaine en effet fut reçu par Lévise qui l’informa que « monsieur » était en haut. Et d’en haut Louis les entendit causer.

— Eh bien ! Lévise, es-tu contente de ta place ? demanda le capitaine.

— Mais oui, monsieur le capitaine.

Il lui prit la joue et ajouta : Tu sais, quand il partira, si tu veux venir à mon service !…

— Montez-vous, capitaine ! cria vivement Louis.

Il était très·contrarié et de ce que le capitaine tutoyait Lévise, ce qui était pourtant naturel, car le vieil imbécile avait de l’importance à Mangues, et de ce que Lévise répondait avec humilité à un être que lui, Louis, traitait sans aucune considération. Le jeune homme vit aussi dans les paroles du capitaine une insinuation doublement injurieuse, parce qu’elles pouvaient faire penser à la jeune fille qu’elle serait quittée, et que le capitaine se permettait de regarder Lévise comme faite pour lui.

Louis aurait voulu qu’on fût rempli de respect pour Lévise, idole véritable, mais qu’il était impossible de placer sur un trône ou sur un autel. Il commença à s’en apercevoir assez douloureusement. Aussi le capitaine se trouva-t-il en face d’une figure presque irritée, et, ayant voulu tracasser Louis de ses sottes plaisanteries, fut-il reçu comme un chien par un loup qui se contient.

Cette petite scène avec le capitaine fut encore une tache grise qui resta parmi l’éblouissement des premières heures de félicité. Elle força Louis à envisager plus nettement la position ou il s’était mis avec Lévise.