Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/188

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Ne valait-il pas mieux se découvrir franchement que se cacher si mal ?

Il entrevit les soucis, les embarras ; mais s’arracher si tôt à cette douce inertie où il vivait, se jeter dans des démarches fatigantes, difficiles, rudes, il ne le voulait pas ! Il s’en remit à sa bonne étoile et ferma les yeux paresseusement pour ne point voir en face la nécessité qui s’approchait, nécessité d’expier sa faute, ou de la réparer ou d’en soutenir énergiquement les conséquences. Elle était assez importune, cette voix qui, une fois déjà, avait versé dans son oreille inquiète ces paroles : Tu as séduit cette fille, la voilà attachée à toi, que feras-tu ? L’emmèneras-tu, l’épouseras-tu, la quitteras-tu ? Pour chacune de ces déterminations, il faut un effort énergique ! À quoi bon l’écouter, quand rien de grave encore ne justifiait l’avertissement ! Louis voulut être heureux encore quelque temps. Il avait cru atteindre un bon résultat en suivant sa passion, et maintenant par quelle subite clarté ou quelle fermeté d’esprit aurait-il pu reconnaître qu’il s’était peut-être trompé et que le beau château si laborieusement construit était sapé à la base. Néanmoins un ferment de souci et de vigilance fut déposé dans son cerveau par cette aventure. Il surveilla attentivement Lévise. C’était pour elle qu’il avait à craindre, c’était elle qu’il avait à sauvegarder.

Il sembla bien à Louis que la prospérité faisait un peu perdre la tête à la jeune fille et qu’elle avait une extrême envie d’aller crier la vérité par-dessus les toits tant elle était enorgueillie. La beauté de ses toilettes augmentait tous les jours et elle manifestait quelque dédain pour les paysans. Cependant Louis ne blâmait pas la naïveté et la vivacité des nouvelles impressions de Lévise, elles étaient un charmant spectacle pour lui. Louis ne s’apparte-