Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/195

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

procurer à son tour un fusil. Ils étaient toujours en bataille avec les autres petits paysans, et, excités par les mots voleurs et mendiants qu’on ne leur épargnait pas, ils allaient à la bataille avec rage. Ces combats, la vie en plein air ne contribuèrent pas moins que le tempérament à en faire des êtres robustes, sauvages, d’une force redoutable qui les rendit la terreur de Mangues.

Pendant l’enfance, Lévise et Guillaume avaient été assez bons amis. La petite fille allait souvent porter à manger au petit garçon sous les bois. Un peu plus tard, il lui déplut, elle le trouvait brutal, méchant. Néanmoins comme elle était forcée de vivre avec eux en dehors du village où elle partageait l’inimitié et la répulsion que s’étaient attirées les deux jeunes braconniers, Guillaume disait souvent en riant qu’elle serait sa femme. Il finit, quand il eut dix-neuf ou vingt ans, par s’en expliquer sérieusement avec Volusien, qui répondit que la chose était toute naturelle. Ils en parlèrent aussi un jour à Lévise. Elle répliqua qu’on avait bien le temps d’y songer, ce qui ne parut pas être un refus aux deux paysans. Néanmoins, depuis ce moment-là, Lévise se préoccupa de trouver de l’ouvrage dans le village, pour se séparer d’eux. Ses efforts ne réussirent pas beaucoup. Guillaume lui demanda encore une fois de se déclarer nettement. Elle lui dit qu’elle ne l’épouserait pas. Il y eut une scène violente. Sur ces entrefaites, Guillaume, ayant maltraité un paysan dans une querelle de cabaret, avait reçu du maire l’ordre de quitter la commune pendant plusieurs mois, s’il ne voulait pas être puni plus sévèrement. C’est pendant cette absence que Louis était venu s’installer à Mangues et s’était épris de Lévise.

Dés qu’il eut remis le pied sur le sol de la commune, le beau Guillaume se dirigea chez Volusien qui lui donnait